Don Delaplante, « Un corps pourrait résoudre l’énigme de la mort de Tom Thomson, mystère de longue date dans le monde artistique », The Globe and Mail, 10 oct. 1956

Parc Algonquin, 9 oct. – Un corps retiré d’une tombe située en pleine nature sur une colline surplombant le pittoresque lac Canoe pourrait résoudre l’énigme entourant la mort du peintre canadien Tom Thomson survenue il y a 39 ans.

Le corps a été découvert par quatre hommes, William Little, directeur de la maison de correction de l’Ontario située à Brampton, Jack Eastaugh, directeur de l’école publique Norseman à Etobicoke, ainsi que Leonard Gibson et Frank Braught de Guelph.

Le bureau du procureur général mène actuellement une enquête sur la découverte. On a rapporté qu’il y avait un trou dans le crâne du corps exhumé, qui a été trouvé dans un cercueil pourri dans une boîte en pin.

La mort de Thomson, un des plus grands peintres canadiens et un contemporain du célèbre Groupe des Sept, demeure un mystère dans le monde artistique depuis près de quatre décennies.

La découverte a été effectuée par les quatre hommes il y a dix jours alors qu’ils étaient partis en expédition pour faire des croquis. « Tout ça est arrivé par hasard », a affirmé M. Little joint à son domicile de Brampton.

Les hommes n’étaient pas convaincus que l’artiste était mort accidentellement. Ils adhéraient plutôt à la théorie selon laquelle Thomson aurait été victime d’un acte criminel.

« Nous avions traversé le lac à la pagaie à la recherche d’un endroit où faire des croquis. La rive nord semblait attrayante, alors nous nous sommes arrêtés près du site du vieux Mowat Lodge. Nous avons gravi la colline jusqu’à l’endroit connu où les riverains croyaient que Thomson avait été enterré. »

Sur la colline située à environ un quart de mille à l'intérieur de la côte ouest, il y avait deux tombes portant des inscriptions. L’une d’elles était celle d’Alexander Hayhurst, 8 ans, mort de la diphtérie en 1915. La famille du petit garçon possédait un cottage au bord du lac et, compte tenu de la nature de la maladie, les autorités voulaient que sa dépouille soit inhumée dans la forêt.

L’autre est celle de James Watson, un bûcheron à l’emploi de la Gilmour Lumber Co. mort le 25 mai 1891.

La tombe mystérieuse a été trouvée entre 12 et 15 pieds au nord de celle de Watson. Selon ce qu’on raconte ici, Thomson avait été enterré quelques pieds au nord d’un grand bouleau qui s’élève maintenant à environ 150 pieds dans les airs.

M. Little a déclaré qu’ils n’avaient aucunement l’intention de chercher la tombe lorsqu’ils ont entrepris le voyage, mais que, une fois à cet endroit, ils ont décidé que c’était pour eux l’occasion de tenter leur chance et de satisfaire leur curiosité.

« Nous l’avons trouvé à la troisième tentative », a-t-il dit.

Il y avait trois dépressions dans le sol. Le groupe a creusé à la profondeur habituelle de 5 ou 6 pieds dans les deux premières dépressions sans rien trouver.

« Quant à la troisième, c’est par hasard qu’on a fait la découverte. Nous avions presque abandonné le creusage lorsque j’ai frappé ce que je croyais être une petite racine, mais c’était en fait une planche de pin. C’est ce qui nous a menés à croire que nous avions découvert quelque chose. »

Ils ont rapidement déterré les restes d’une boîte rudimentaire en pin ainsi qu’un cercueil et des ossements. Ils ont communiqué avec le Dr Harold Ebbs de Toronto, qui était en vacances au lac à ce moment.

« Nous lui avons fait examiner les ossements que nous avions trouvés. Je crois qu’il a compris l’importance de la découverte. Nous avons donc refermé la tombe immédiatement. Nous étions certains de savoir ce que nous avions trouvé. Le Dr Ebbs a ensuite avisé les autorités concernées. »

M. Little a déclaré que le bureau du procureur général s’est joint à l’enquête et qu’un examen pathologique de tous les ossements sera effectué.

Il a mentionné que, selon le Dr Ebbs, les ossements appartenaient à un homme de race blanche d’environ 40 ans.

Le Dr Noble Sharpe, directeur médical du laboratoire judiciaire du bureau du procureur général, a déclaré la nuit dernière être en train d’examiner les ossements.

« Toutefois, je serais surpris s’il s’agissait des os de Thomson. Cette histoire n’est qu’une légende de la région. »

Il a confirmé qu’il y avait un trou dans le crâne, mais à la suite d’un examen superficiel, il ne croyait pas qu’il avait été causé par un instrument pointu ou une balle de fusil.

« Il est plus probable que ce soit une érosion parfaitement normale. »

Le Dr Sharpe a déclaré qu’il avait reçu les ossements, qui permettaient de reconstituer un squelette humain en totalité, pendant la fin de semaine. Au cours des deux ou trois prochaines semaines, il tentera de déterminer l’âge, la taille et l’origine raciale de la personne et vérifiera [quatre mots illisibles] pensait que les ossements étaient enterrés depuis au moins 50 ans.

[...]

Thomson résidait à Mowat’s Lodge, situé à environ un quart de mille de la tombe, lorsqu’il est mort. On raconte qu’il était en mauvais termes avec un homme de l’auberge, qui a été rasée par les flammes il y a environ 30 ans.

Toutefois, certains résidents croient que le corps pourrait être celui d’un bûcheron non identifié qui a travaillé pour la compagnie Gilmour il y a plusieurs années. Mme Jean Chittendon a dit qu’on lui avait raconté qu’il y a plusieurs tombes sans inscription adjacentes à celles de Hayhurst et de Watson.

Source: Don Delaplante, "Un corps pourrait résoudre l’énigme de la mort de Tom Thomson, mystère de longue date dans le monde artistique," The Globe and Mail, 10 octobre 1956

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