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Journal Soeur Véronique Cuillerier, hospitalière de Saint-Joseph. Relation de 1734.

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[...]Le 10 avril [1734] que tout étoit fort tranquille et que l'on pensoit à rien moins qu'à quelques accidens funestes, à 7 heures du soir que nous estions en récréation, nous entendîmes crier au feu. Aussytôt, toutes se levèrent pour s'assurer où il étoit. On l'aperçut aussytôt à une maison voisine. On s'empressa d’abattre le feu, mais le Seigneur ne permit pas que l'on réussît. Tout le monde sauvoit dans notre église, pensant que nous serions préservées, mais les flammes se portèrent avec tant d'impétuosité sur l'église, qui n'étoit éloignée des maisons en feu que de la rue, que nous nous vîmes aussytôt embrasées. Alors on pensa à sauver, mais il était trop tard, les flammes s'étoient portées sur toute la maison dans un instant, en sorte que le toit étoit tombé quand plusieurs sortirent. [Il] y en eut même deux qui pensèrent rester, qui étoient dans le dortoir à sauver. Elles ne s'aperçurent pas que les maisons voisines du bout du bâtiment avoient mis le feu contre l’église, au bout oposé, en sorte qu’elles étoient embrasées de tous côtés, et que le grand escalier étoit enflammé, quand elle entendirent crier par quelqu'un, qui les avoit vu par les fenêtres, de se sauver, qu'il n'y avoit plus un moment à perdre. Elles se rendirent aussytôt, mais elles furent effrayées de voir l'escalier, par où elles devoient passer, tout en feu, cependant elles passèrent et purent sortir par l'infirmerie qui donnoit sur le jardin où elles purent rejoindre les autres, qui pensèrent peu à la perte du bien puisque nous avions le bonheur d'estre toutes sauvées.

Cependant, nous nous voyons dehors, dans une saison encore très froide et dans la boue jusqu'au genoux. Nous fumes toutes dans la petite chapelle de la très Sainte-Vierge, qui est au milieu du jardin, et là nous donnâmes cours à nos larmes, nous voyant encore une troisième fois hors de notre cher monastère sans savoir où aller, n’ayant

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auquune ressource à espérer de la part du public, qui étoit incendié comme nous. [...]Plusieurs personnes vinrent nous apporter quelques rafraîchissement, entre autres les prêtres du séminaire, mais on [n’]étoit point en état d’en profiter. [...]

Source: Archives des Religieuses Hospitalières de Saint-Joseph de Montréal, Orig. ms, 1A4 / 3 Véronique Cuillerier 1725-1747, , Cuillerier, Véronique, "Annales de l'Hötel-Dieu de Montréal," n.d., 336-337. Notes: Selon la transcription faite par Ghislaine Legendre.

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