Le contexte du procès

Le procès d'Angélique nous plonge dans un monde qui nous est peu familier par son environnement physique, son fonctionnement politique, ses rapports économiques et ses relations sociales. Le régime absolutiste tolère encore moins de démocratie dans la colonie que dans la métropole et ne permet pas la liberté d’expression. Il n’existe aucun journal en Nouvelle-France et le roi a interdit qu’on y importe des presses pour l'imprimerie. L'esclavage est reconnu par la loi et la torture est incorporée à la procédure judiciaire.

Dans cette section, les documents illustrent des aspects du contexte urbain, de la société et de la justice. Dans la sous-section « Références », des ressources présentent le vocabulaire, les personnages et les points de repères cités dans les documents. La chronologie rappelle la trame événementielle entourant l’incendie de la ville et le procès d’Angélique.

À cette époque, Montréal est toujours une ville jeune, fondée moins de 100 ans auparavant. Située à l’extrémité sud-ouest de la plaine laurentienne, Montréal est le point de départ des expéditions commerciales et militaires vers l’intérieur du pays. On y retrouve donc des alliés amérindiens, plusieurs esclaves issus de nations ennemies et une importante garnison de soldats des troupes de la Marine. La nature « domestique » des événements à l’étude explique que les alliés amérindiens soient peu présents dans les documents présentés dans ce site. Ce même volet domestique place les esclaves, d’origine tant amérindienne qu’africaine, au cœur de la vie quotidienne des Montréalais et de l’incendie lui-même. Marie dite Manon, esclave panis, et surtout Angélique, esclave noire, sont deux des personnages principaux de cette histoire. Quant aux soldats, ils sont omniprésents comme acteurs en arrière-plan des événements : ils montent la garde, ils combattent l’incendie, ils encadrent l’exécution.

Montréal est donc plus diversifiée qu’on pourrait le croire mais elle est aussi une ville dont la population est en majorité d’origine française. La structure sociale reprend donc les principales divisions de classes qu’on observe alors en France. Entre l’élite qui veille sur l’administration et le commerce d’une part, et les individus marginaux qui trempent dans la petite criminalité d’autre part, les conditions de vie sont fort différentes. Les jeunes filles et les femmes mariées sont placées sous la tutelle légale de leur père ou de leur mari mais les réalités de la vie préindustrielle en amènent plusieurs à jouer un rôle dans la sphère publique.

L’incendie du 10 avril 1734 étant à l’origine de cette histoire, il faut comprendre les aspects physiques de la ville. L’incendie lui-même et la réaction des gens devant ce désastre nous amènent à vouloir comprendre comment le feu est utilisé et comment on tente de le contenir dans un contexte urbain densément construit.

Enfin, on peut difficilement suivre le déroulement du procès d’Angélique sans connaître la procédure criminelle française. Une description sommaire de l’administration permet ensuite de présenter la procédure elle-même telle que décrite à l’époque. Plusieurs officiers ont aussi à intervenir dans le processus et il est important de connaître les fonctions de chacun d’entre eux. En bout de ligne, Angélique recevra une sentence qui peut nous sembler très cruelle. Mais qu’en est-il par rapport aux pratiques de l’époque?