Histoire de la francophonie

Madame Tremblay ne tremble devant rien : portrait d'une pionnière

FORTIN (TREMBLAY), Émilie — Cette héroïne du Nord est née le 4 janvier 1872 à Saint-Joseph-d'Alma, au Québec. Lorsque Émilie a quinze ans, sa famille émigre à Cohoes, New York (É.-U.). Elle y rencontre Nolasque Tremblay, qu'elle épouse le 11 décembre 1893. Le 16 juin 1894, après un voyage de noces de 5 000 milles truffé d'événements cocasses, Émilie arrive à Fortymile, au Yukon. Elle devient alors la première femme blanche à avoir traversé le col Chilkoot.

Le couple passe un hiver à Miller Creek dans une petite cabane en rondins, recouverte d'un toit de terre avec une fenêtre faite de bouteilles de verre. Cette année-là, elle envoie des invitations sur écorce de bouleau à tous les mineurs de la région pour les inviter à partager le repas de Noël.

Au menu : lapin farci, rôti de caribou, haricots bruns bouillis, sardines du roi Oscar, pommes de terre évaporées, beurre et pain sourdough, pouding aux prunes.

Au printemps, Émilie et son mari font un jardin sur le toit de leur cabane et récoltent radis et laitue à profusion. De l'automne 1895 au printemps 1898, les Tremblay rendent visite à leurs familles aux États-Unis et au Québec. Ils reviennent par la piste Chilkoot en pleine Ruée vers l'or. En 1906, ils feront un voyage de quatre mois en Europe. Jusqu'en 1913, M. et Mme Tremblay se promènent d'un emplacement minier à un autre dans le Klondike. À la suite de difficultés financières, Émilie et Nolasque viennent s'établir à Dawson. Elle y ouvre un magasin de vêtements pour dames. Ce magasin est aujourd'hui un bâtiment historique dans la ville de Dawson.

Émilie Tremblay était une femme très courageuse qui s'est distinguée par son engagement social et son dévouement pour les autres. Elle a été la fondatrice des Ladies of the Golden North, la présidente du Yukon Women Pioneers et membre à vie des Daughter's of the Empire. Les nombreuses médailles qu'elle a reçues pour ses bonnes actions et quelques-uns de ses souvenirs ont été remis au musée du Saguenay, au Québec. Elle a été marraine de 25 enfants en plus d'élever une de ses nièces des États-Unis, fille de sa sœur demeurée veuve avec neuf enfants. Elle a emmené la jeune fille au Yukon à son retour d'Europe. La maison des Tremblay était toujours ouverte aux voyageurs, aux missionnaires et aux veuves. Monseigneur Bunoz appelait Émilie la « mère des missionnaires du Klondike ». Durant la guerre, elle a tricoté 263 paires de chaussettes pour les soldats, sans compter toutes celles qu'elle a offertes en cadeau.

Un an après la mort de son mari en 1935, elle rend visite à sa parenté et à ses amis du Québec et des États-Unis (1936-1939). En 1940, de retour à Dawson, Émilie, âgée de 68 ans, épouse Louis Lagrois à Dawson. La messe est célébrée par le père Leray. Après son deuxième mariage, elle laisse son commerce et déménage dans la cabane de M. Lagrois à Grand Forks, au Yukon. En août 1946, elle se rend à San Francisco pour participer au congrès annuel des anciens pionniers du Yukon. Elle a passé les dernières années de sa vie dans une maison de retraite à Victoria, en Colombie-Britannique. Émilie Tremblay est décédée le 22 avril 1949 à l'âge de 77 ans.

L'école de langue française de Whitehorse a été nommée en l'honneur de cette pionnière. Une vidéocassette relatant les grands moments de la vie d'Émilie Tremblay a d'ailleurs été produite avec la participation des élèves de cette école (BOBILLIER, M. Une pionnière du Yukon, AFY, Entrevue avec Émilie Tremblay, Chicoutimi, Québec, avril 1937, p. 8; GIRARD, C., et R. LAROCHE. Un jardin sur le toit, p. 90. ).

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