Audrey Saunders, "M. et Mme Shannon Fraser," L’histoire du parc Algonquin, 1963

[ Shannon Fraser, Annie Fraser, and others ]

Shannon Fraser, Annie Fraser et autres, Inconnu, Algonquin Park Archives, APMA 48, Shannon et Annie Fraser sont à gauche

[…] Une autre femme qui a contribué à faire connaître le district du lac Canoe, tant aux touristes qu’aux gens des environs, a été Mme Shannon Fraser. Elle a d’abord emménagé dans le village abandonné de Mowat lorsque les syndics ont nommé son mari pour assurer la supervision de la propriété sur laquelle était construite la scierie. Jusque là, c’était Bob Gallna qui avait été le concierge à partir du moment où la scierie a eu cessé ses activités, et pendant de nombreuses années, son nom et sa présence cordiale ont continué d’habiter la mémoire des anciens résidants qui s’arrêtaient au lac Canoe pour visiter l’emplacement de la vieille scierie. Les Fraser ont pris la relève pendant quelques années avant d’acheter certains des vieux bâtiments pour leur propre usage et de transformer les lieux en un centre de villégiature prospère.

Au départ, les Fraser vivaient dans le vieil hôpital de la Gilmour, au sommet de la colline, mais en 1913 ils ont acheté le bâtiment qui servait de cuisine et de maison de pension aux ouvriers de la scierie à l’époque où Mowat était un village florissant. Puis, en plus de leurs tâches liées au bureau de poste, les Fraser ont ouvert une maison de pension pour les visiteurs estivaux. Mme Fraser s’est avéré être une si bonne gérante que, l’année suivante, l’entrepôt de l’ancienne société était acheté et réparé pour combler les besoins de l’entreprise de plus en plus prospère. Avant qu’un incendie détruise ces deux bâtiments, l’établissement de Shannon Fraser était l’endroit de prédilection des visiteurs du parc. Shannon était d’un naturel jovial et avait un don pour raconter une bonne histoire et sa femme avait grand cœur, un caractère d’une grande douceur et elle savait cuisiner. Aujourd’hui, maints visiteurs du parc qui ont un jour dormi et mangé sous le toit de Mowat Lodge se souviennent du caractère sociable des Fraser et de la bonne nourriture qu’ils servaient.

Parfois, Shannon trouvait difficile d’obtenir de l’aide au bureau de poste ou à la maison de pension et persuadait ses invités de prolonger leur séjour et de travailler pour lui pendant un certain temps. Tom Thomson se rendait toujours chez les Fraser quand il venait au parc et leur donnait souvent un coup de main; habituellement, il était guide lors des parties de pêche, mais souvent, en particulier au printemps et à l’automne, il accomplissait n’importe quelle tâche, que ce soit essuyer la vaisselle pour Mme Fraser ou réparer le toit pour son mari.

L’un des sujets de plaisanterie continuels au sein de la communauté du lac Canoe était l’optimisme de Shannon Fraser quant au nombre d’invités qu’il comptait voir arriver à bord du prochain train. Ses voisins adoraient lui demander combien d’invités il allait accueillir chaque fois qu’ils le croisaient sur le chemin de la gare, empruntant la route de la vieille scierie.

« J’attends beaucoup de monde aujourd’hui », leur répondait-il invariablement. Quand il revenait un peu plus tard avec un wagon vide, il expliquait, un large sourire aux lèvres : « Ils ont dû rater celui-là. »

Au dire de tous, Shannon avait des problèmes avec certains résidants du lac Canoe qui travaillaient pour lui de temps à autre. Deux d’entre eux, George Rowe et Larry Dickson, étaient bien connus du Dr Bertram, de M. Hayhurst et d’autres propriétaires de maison d’été qui sont arrivés dans le secteur après 1906. Rowe et Dickson vivaient dans de petites cabanes situées sur la propriété de la vieille scierie et gagnaient un petit surplus d’argent pendant l’été en étant guides lors des parties de pêche dans le parc. Le cottage de Larry, situé au sommet de la colline près de l’emplacement du vieil hôpital, a été rendu célèbre en devenant le sujet de la toile de Tom Thomson xLa cabane de Larry Dickson, qui se trouve actuellement à la Galerie nationale du Canada à Ottawa.

Apparemment, les deux hommes prenaient souvent un verre de trop, en dépit des lois du parc. Lorsque cela se produisait, les affaires de Shannon en souffraient et il les congédiait, ce qui rendait les choses difficiles pour Shannon. Dans une plainte qu’il avait écrite à l’intention de M. Bartlett, il affirmait que quelqu’un avait donné de la « licqueur » à George Rowe, ce qui avait fait en sorte que « la madame avait dû s’occuper du courrier ». Mais peu après tout était pardonné et oublié, et George et Larry reprenaient le travail jusqu’à ce qu’ils récidivent. Soit dit en passant, ces deux hommes à tout faire devaient être plutôt résistants : un jour, Larry Dickson a dit à M. Hayhurst qu’il ne jurait que par le liniment de cheval pour guérir tous les maux; chaque fois que vous voulez vous débarrasser d’une gueule de bois, disait-il à ce visiteur estival, tout ce que vous avez à faire, c’est d’en prendre quelques gouttes sur un morceau de sucre! […]

Source: Audrey Saunders, M. et Mme Shannon Fraser in Algonquin Story, (: Ontario Department of Lands and Forests, 1963), 129-130. Notes: D'abord publié en 194?

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