HYSTÉRIE.

Définition. – Un état dans lequel l’esprit domine le corps et provoque des changements pathologiques à ses fonctions (Möbius).

Étiologie. –

Cette affection, plus répandue chez les femmes, se déclare habituellement autour de la puberté, mais les symptômes peuvent se poursuivre jusqu’à l’avènement de la ménopause, voire de la vieillesse. Les hommes et les garçons n’y sont cependant pas immunisés, et ces dernières années, le sujet de l’hystérie masculine a suscité un vif intérêt. Elle est présente chez toutes les races, mais est beaucoup plus commune chez les sujets de race latine. Dans ce pays, les cas bénins sont fréquents tandis que les cas graves n’atteignent pas la haute prévalence observée en France.

Des facteurs prédisposant à l’hystérie, deux prédominent : l’hérédité et l’éducation. Le premier agit en dotant l’enfant d’un système nerveux anormalement sensible et volatil. Les cas proviennent le plus souvent de familles présentant des tendances névropathiques accusées, et dont les membres ont souffert de diverses névroses. L’éducation à la maison échoue trop souvent à inculquer des habitudes de contrôle de soi. Une fillette traverse l’enfance avec une vision faussée de son rapport aux autres, et s’habitue à ce que tous ses caprices soient satisfaits et que toutes ses peines, quand bien même insignifiantes, soient consolées avec un généreux empressement; elle atteint l’âge adulte doté d’un système moral inapte à faire face aux soucis et aux préoccupations de la vie de tous les jours. À l’école, entre les âges de douze et quinze ans – la période la plus cruciale de sa vie, où les énergies vitales du corps sont consacrées à la croissance rapide de l’organisme – elle est souvent en train d’étudier d'arrache-pied pour ses examens et reste fréquemment enfermée dans des salles de classe étouffantes de six à huit heures par jour. Il en résulte trop souvent un esprit alerte et éveillé dans un corps affaibli, inapte aux fonctions pour lesquels il a été constitué, facilement perturbé, et enclin à réagir anormalement aux stimuli ordinaires de l’existence. Parmi les influences plus directes se trouvent les émotions de toutes sortes, parfois la frayeur et, plus fréquemment les aventures amoureuses, le chagrin et les préoccupations domestiques. Bien que les causes physiques soient rarement à l’origine de l’hystérie, la survenue de ce trouble peut cependant succéder à une blessure, se développer au cours de la convalescence à une maladie grave ou être associée à un dérèglement des organes vitaux. L’appellation hystérie indique l’importance que l’on accordait à l’utérus dans l’apparition de ce mal. Les opinions à ce sujet sont fort variées, mais dans de nombreux cas, il y a indéniablement présence de troubles ovariens et utérins, et le traitement de ceux-ci guérit parfois la maladie. Les excès sexuels, particulièrement la masturbation, jouent un rôle important, chez les garçons comme chez les filles.

Traitement. – […]Soigner l’hystérie en tant qu’affection physique est, sans conteste, fondamentalement erroné. Il s’agit essentiellement d’une dysfonction mentale et émotive, et l’élément crucial du traitement doit être le contrôle moral. À la maison, entourés de proches attentionnés qui interprètent mal les symptômes et n’ont aucune compréhension de la nature de la maladie, les cas d’hystérie les plus sévères ont peu de chance de se résorber. Le contrôle requis ne peut être atteint, d’où le mérite singulier de la méthode introduite par Weir Mitchell, qui est particulièrement appropriée pour les cas avancés devenus chroniques et dans lesquels le malade est confiné au lit. Le traitement prescrit l’isolation, le repos, une diète particulière, le massage, et l’électricité. La séparation des amis et des membres de la famille compatissants, qui doit être absolue, ne peut que très rarement, voire jamais, être obtenue à même la résidence du patient. Un aspect crucial du traitement est une infirmière à l’esprit alerte. Une part non négligeable des succès récoltés par l’auteur de ce plan est attribuable au fait qu’il s’est toujours assuré le soutien de femmes intelligentes et vives. Le plan s’élabore comme suit : le patient est confiné au lit et il lui est interdit de se lever, et dans les cas exacerbés, de lire, d’écrire ou de se nourrir lui-même. Un massage est administré quotidiennement, initialement pour une période de vingt minutes ou une demi-heure. Le massage est indispensable en tant que substitut à l’exercice. Le courant électrique est appliqué aux muscles et à la colonne. Son emploi n’est cependant pas aussi essentiel que celui du massage. Au départ, la diète peut être constituée uniquement de lait, à raison de quatre onces aux deux heures. Il est préférable d’utiliser du lait écrémé, qui peut être dilué dans du soda ou de l’orgeat, et peptonisé au besoin. Après une semaine ou dix jours, la diète peut être élargie, la quantité de lait demeurant cependant inchangée. Une côtelette peut être servie à la mi-journée, une tasse de café ou de chocolat avec des rôties, des tartines au beurre, ou un biscuit peuvent accompagner la portion de lait. Habituellement, les patients engraissent rapidement à mesure que sont introduits les aliments solides, une prise de poids qui s’accompagne, en règle générale, d’une diminution voire de l’arrêt complet des symptômes nerveux. Le lait est l’élément central de la diète, et à lui seul suffit amplement.

Les résultats formidables obtenus grâce à cette méthode sont maintenant universellement reconnus. Le plan est plus approprié aux patients minces qu’aux patients hystériques gras et flasques. Il est non seulement adapté aux formes d’hystérie les plus persistantes, qui sont accompagnées de symptômes physiques, mais aussi aux cas doublés de troubles mentaux, pour lesquels l’isolement et la séparation des amis et des proches sont particulièrement bénéfiques.

Source: William Osler, "HYSTÉRIE." (New York: Appelton, 1892), 967, 977-978

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