Opposition à la guerre en Europe

U.S. News-World Report, 9 juin 1950, p. 25-26

Worldgram

DES CAPITALES DU MONDE

Sous la surface, la vague d’opinions européenne et asiatique est contre les É.-U. La résistance aux idées américaines s’intensifie. L’irritation contre le pouvoir et le comportement américain s'accroît. La popularité américaine à l’étranger s’effrite.

La nouvelle idée américaine, la « guerre froide » totale, est impopulaire même auprès des populations qui ont le plus à redouter de la Russie. La plupart des gens pensent qu’une guerre froide totale ne peut que se terminer par une guerre ouverte. Une personne habitant sur le continent, ou près du littoral asiatique, ne veut pas de guerre. Elle ne veut pas y être mêlée de quelque façon que ce soit. Elle commence à accuser les É.-U., à tort ou à raison, de pousser le monde vers la Troisième Guerre mondiale. [...]

On retrouve ces attitudes à Paris, à Rome, à Tokyo et ailleurs : les Français vantent la neutralité. Plusieurs pensent que le plan Schuman, qui met en commun le charbon et l’acier de l’Europe de l’Ouest, est un bon départ. Les Ouest-Allemands aiment l’idée de neutralité et montrent peu d’intérêt pour un réarmement. Les Italiens sont plus intéressés par le travail, la terre, la nourriture et Trieste que par la guerre froide. Les Autrichiens ne veulent plus de la guerre froide. Les gauchistes britanniques, même si leur gouvernement est engagé dans un partenariat avec les Américains, préfèrent vraiment l’indépendance et le rôle de médiateur entre les É.-U. et la Russie. [...]

Au Japon, la population envoie des signaux indiquant qu’il est temps de mettre un terme à l’occupation américaine. Ils veulent un traité de paix, mais ils ne veulent pas de bases américaines qui pourraient les impliquer dans une guerre entre Américains et Soviétiques.

Les Asiatiques en général montrent très peu d’enthousiasme pour l’idée américaine d’une guerre froide totale. [...]

Les propagandistes moscovites, il est vrai, ont crié plus haut et plus fort que Washington. Moscou répète que la Russie veut la paix et ne cesse de qualifier les É.-U. de bellicistes. Au début, les observateurs ne croient pas Moscou, mais ils ont tendance à le faire lorsqu’ils voient que Washington met presque toujours l’accent sur la guerre froide et non sur la paix. [...]

Ernest Bevin, le secrétaire du Foreign Office de Grande-Bretagne, a des conseils à donner aux nations occidentales sur la façon de bien s’entendre avec les Asiatiques. Partant de la longue expérience des Britanniques, il dit… [...]

Reconnaître la Chine? Aussi bien le faire. Les communistes ont gagné la guerre civile. Ce n’est pas à la Grande-Bretagne, ou aux autres, de retarder sa reconnaissance parce qu’elle n’aime pas la forme du gouvernement chinois. [...]

La montée nationaliste, ajoute Bevin, est une réalité dans toute l’Asie. L’Ouest ferait mieux de le reconnaître, comme la Grande-Bretagne l’a fait en Inde, au Pakistan, en Birmanie et au Ceylan. En Indochine, la France ferait mieux de suivre l’exemple de la Grande-Bretagne, pense Bevin.

En résumé, laisse entendre Bevin, la seule chance de l’Ouest de garder un pied en Asie est d'encaisser le coup et d’admettre que ce sont maintenant les Asiatiques qui gouvernent l'Asie.

Source: No author, "Opposition à la guerre en Europe," U.S. News-World Report, 9 juin 1950. Notes: p. 25-26

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