Les Affaires extérieures confrontent Norman au sujet de Halperin

CONFIDENTIEL

24 octobre 1950

1. M. N. A .Robertson et moi avons rencontré M. E. H. Norman dans mon bureau aujourd’hui.

2. J’ai eu la désagréable tâche de lui dire que les autorités canadiennes et américaines avaient découvert sept entrées le concernant dans le calepin de Halperin. Je lui ai fait remarquer que le calepin prenait maintenant une place importante dans les questions de sécurité depuis que le nom de Fuchs [Klaus Fuchs, l'espion qui a divulgué des secrets concernant les bombes atomiques] y a été trouvé. J’ai dit être certain qu’il verrait les conséquences de ces entrées tant pour lui-même que pour le ministère des Affaires extérieures. C’est pour cette raison qu’il avait été rappelé et que j’ai décidé, après qu’il eût fait ses premiers rapports, de lui en parler directement pour entendre sa version des évènements.

[…]

5. Je lui ai demandé s'il avait déjà été membre du Parti communiste et il a répondu de façon catégorique qu’il ne l’avait jamais été. Il a dit que pendant ses années d’études universitaires à Toronto et à Cambridge, il avait été associé à des groupes radicaux dont certains membres étaient des Rouges. Il avait été membre de la Ligue pour la reconstruction sociale à Toronto et d’un groupe social à Cambridge et il a mentionné le nom de communistes qu’il avait connu à Cambridge. Il a dit que ces intérêts et ces activités politiques s’étaient terminés à la fin de ses études universitaires et qu’il avait des intérêts différents à Harvard. Une fois devenu employé du gouvernement, il faisait attention de ne donner aucun détail sur le travail qu'il faisait lors de ses contacts avec Halperin, ou qui que ce soit. Il savait que cela était très confidentiel.

6. Je lui ai dit que je ne faisais aucune allégation, mais qu’il devait reconnaître que la présence de son nom dans le calepin et son association avec Halperin, et peut-être avec d’autres, soulevaient de sérieuses questions au Ministère. Je ne savais pas à quel moment l’affaire serait portée à l’attention du public et que si cela se produisait, nous serions tous dans une position très fâcheuse.

7. Je lui ai demandé pourquoi il n'avait pas averti le Ministère qu’il connaissait Halperin une fois que la Commission royale d’enquête sur l’espionnage avait été instituée et que le nom de Halperin y avait été mentionné. Norman a répondu qu’il s’était beaucoup inquiété à ce sujet et, pressentant que les preuves amèneraient le Ministère à découvrir l’existence de cette association, il avait conclu qu’il ne devrait pas soulever lui-même la question. Robertson et moi lui avons tous les deux fait remarquer que s’il l’avait fait à l’époque, sa position serait beaucoup plus facile à expliquer aujourd’hui. Norman était d’accord avec le fait qu’il avait commis une erreur, mais il a ajouté que puisqu’il avait la conscience tranquille, il ne pensait pas que la mention de ce fait serait une sage décision.

8. Norman a dit reconnaître pleinement la position embarrassante dans laquelle ces développements mettaient le Ministère et il tenait beaucoup à ne pas faire de tort au Ministère. Il a dit être prêt à donner sa démission si cela s’avérait être la bonne ligne de conduite. Nous n’avons fait aucun commentaire quant à cette suggestion. Je lui ai dit que nous pensions qu’il devrait prendre un congé après avoir vu le ministre demain. D’ici là, autant lui que nous devrions réfléchir à la suite des choses.

[…]

George Glazebrook

Source: Canadian Security Intelligence Service, Access to Information Request, File 117-89-109, George Glazebrook, Les Affaires extérieures confrontent Norman au sujet de Halperin, 24 octobre 1950

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