Premiers jours sur le Yukon et l’histoire des découvertes d’or qu’on y fait

Parmi ceux qui sont venus au Yukon en quête d’aventure avant même que le Klondike soit découvert, on retrouve Robert Henderson, originaire de Big Island, au large de la côte nord de la Nouvelle-Écosse. Il avait été marin durant quelques années, ce qui lui avait permis de parcourir presque toute la planète. De nature aventurière, il entreprend la chasse à l’or, bien plus pour partir à l’aventure que dans le but de devenir riche, car ceux qui le connaissent le mieux croient que même la concession la plus riche en or ne réussirait pas à le faire rester en place. C’est ainsi que nous le retrouvons lors de son séjour au Yukon, et il y est encore en ce moment, continuellement à la recherche de nouveaux champs aurifères. Alors que les autres parcourent les environs des ruisseaux Fortymile et Birch, « Bob » se trouve ailleurs.

Au mois de juillet 1894, Henderson et deux partenaires, Kendrick et Snider, arrivent à Ogilvie, où ils rencontrent le toujours souriant Joe Ladue, responsable des lieux. Il les accueille avec une bonne histoire à propos des prospects sur la rivière Indian, qui se jette dans le fleuve Yukon près de vingt milles en aval de l’endroit où ils se trouvent. Il s’agit d’un sol relativement vierge, ce qui suffit à « Bob » Henderson. Toutefois, cela n’enthousiasme pas autant ses associés qui décident de retourner au Colorado, d’où ils étaient tous arrivés quelques semaines auparavant. Le cours de la rivière Indian est parallèle à celui de la Klondike, et puisque la distance entre les deux à vol d’oiseau n’est que de quinze ou vingt milles, la ligne de partage des eaux qui les sépare est faite de pentes abruptes et est donc bien adaptée pour attraper et retenir l’or contenu dans le gravier qui descend toujours en aval, charrié par les eaux vives.

[…]

À l’embouchure de la Klondike, il aperçoit George Washington Carmac [sic], dont on associe souvent l’histoire avec la découverte du Klondike, et avec celle du Yukon même, selon certains. Henderson, respectant l’accord tacite des mineurs, informe Carmac de la découverte qu’il a faite sur le ruisseau Gold Bottom et l’invite à venir y poser ses jalons. Carmac est alors occupé à pêcher le saumon avec ses amis et associés indiens, dont les membres masculins sont Skookum, ou Jim « le fort », et Charlie le Tagish (parfois Cultus ou « bon à rien »). Alors que Henderson finit de raconter son histoire, Carmac promet de s’y rendre et d’amener ses partenaires indiens avec lui, ce à quoi Henderson s’oppose fermement, déclarant qu’il ne veut pas que son ruisseau soit jalonné par trop d’Indiens, particulièrement des Indiens originaires du cours supérieur de la rivière. Carmac semble offensé par cette objection; les deux hommes se séparent donc. J’ai obtenu sensiblement la même version de la part de Henderson et de Carmac, ce dernier insistant bien entendu sur l’objection émise à l’égard des Indiens. Je me suis longuement entretenu avec Jim et Charlie ainsi qu’avec d’autres personnes qui campaient avec eux le long de la Klondike à cette époque, puis j’ai mis l’essentiel de nos discussions par écrit. Je dois dire que Henderson et Carmac m’ont tous deux raconté la même histoire selon laquelle Henderson a parlé à Carmac de sa nouvelle découverte, et les Indiens m’ont assuré qu’ils savaient que « Bob », comme ils appellent Henderson, l’avait dit à George, comme ils appellent Carmac, et lui avait offert de venir jalonner; on peut donc affirmer cela sans se tromper. On pourrait remettre en question ce que m’ont raconté les Indiens, mais leur ton et leurs affirmations étaient sincères tout au long de leur récit. J’ai pris la précaution de les questionner séparément, puis de les réunir par la suite pour critiquer le récit de chacun et en discuter à titre de ce qu’on pourrait qualifier de comité plénier. Si je la mets en termes aussi concis que possible, l’histoire de Jim nous apprend que lui-même, Charlie et George campaient, comme nous le savons, à l’embouchure de la Klondike et qu’ils pêchaient, mais comme une diète entièrement constituée de poisson finit par lasser, ils ont opté pour un menu plus diversifié et, pour ce faire, ils se sont mis d’accord pour abattre des arbres, les faire flotter jusqu’à Fortymile et les vendre au moulin à scie de l’endroit. Le tarif de l’époque était de vingt-cinq dollars par mille pied-planches. Ce travail reposait en grande partie sur Jim et il a fait beaucoup de repérage dans les bois des environs pour trouver les arbres qui soient les meilleurs et les plus accessibles. Ce travail l’a mené loin en amont d’un ruisseau, plus tard connu sous le nom de Bonanza, qui rejoint la Klondike moins d’un mille au-dessus de son embouchure. Il m’a dit avoir trouvé de très bons arbres à différents endroits le long de ce ruisseau et, afin de déterminer s’il était possible de les faire flotter jusqu’au fleuve Yukon, il a dû examiner de près le lit du ruisseau. Alors qu’il s’y employait, il a trouvé quelques couleurs d’or dans le gravier à différents endroits, mais plus particulièrement là où serait plus tard située la concession soixante-six en aval de la découverte, il a trouvé ce qu’il considérait comme un très bon prospect. De retour au camp de pêche, il a raconté cette découverte, mais elle n’a pas soulevé l’intérêt. Jim, selon ses dires, était impatient de pouvoir y retourner pour poursuivre ses recherches, mais puisque George était le conseiller en chef du camp et qu’il ne semblait pas être très intéressé, l’idée a été temporairement abandonnée.

Environ vingt jours après la visite de Henderson au camp, George lui a dit de se préparer à partir à la recherche de Bob. Jim, Charlie et George ont commencé leur quête en remontant le Bonanza, avec en main une batée, un pic, une hache et d’autres outils du genre nécessaires lors d’un séjour prolongé loin du camp, et avec autant de nourriture que leurs moyens le leur permettaient; selon les Indiens, les provisions étaient insuffisantes et peu diversifiées, se composant surtout de poisson. Voyager par la vallée du ruisseau Bonanza à travers le sous-bois touffu en cette saison était fastidieux et épuisant, sans compter les nuées de moustiques, un tourment qui s’ajoutait à la fatigue. Un peu en aval de l’endroit où ils allaient plus tard faire la découverte, Jim et Charlie m’ont tous deux raconté qu’alors qu’ils lavaient le sable à la batée durant une pause, ils ont récolté une batée de dix cents. Leurs versions varient cependant quelque peu : chacun a déclaré avoir fait la découverte, mais lorsque je les ai confrontés l’un à l’autre, ils se sont entendus pour dire qu’alors qu’ils se reposaient, ils ont eu l’idée d’aller laver un peu de gravier pour le plaisir. Jim a pris la batée et a lavé toute la terre que Charlie lui a apportée, alors ils ont tous deux fait la découverte, même s’ils ne s’y attendaient pas ni l’un ni l’autre. Cette découverte a causé un grand émoi dans cette toute petite communauté, et il a été décidé que si leurs recherches sur le ruisseau Gold Bottom n’étaient pas concluantes, ils reviendraient alors accorder toute leur attention à cet endroit. Les Indiens m’ont tous deux affirmé avoir demandé à George s’ils allaient raconter leur découverte à Bob et que George leur a ordonné de ne rien en dire avant qu’ils reviennent ici, si toutefois ils revenaient, et qu’ils aient davantage inspecté les lieux; ensuite, s’ils trouvaient quelque chose de payant, ils le lui diraient peut-être.

Le voyage à travers la vallée était si éprouvant et fastidieux que, une fois arrivés au confluent du ruisseau maintenant appelé Eldorado, ils ont emprunté la ligne de partage entre ce ruisseau et le ruisseau Bonanza, ont suivi la crête de la ligne de partage des eaux en contournant la source du ruisseau Bonanza, où ils ont trouvé les marques laissées par Henderson, puis sont descendus rejoindre ce dernier. Rendus là-bas, ils n’avaient presque plus de provisions et n’avaient plus du tout de tabac, une situation particulièrement difficile pour Jim et Charlie. Henderson, soit parce qu’il était lui-même en pénurie, soit par dégoût pour les Indiens, soit pour ces deux raisons, n’a rien voulu leur donner même si Jim et Charlie m’ont tous deux assuré qu’ils avaient offert de bien le payer pour ce qu’ils auraient obtenu, ce que Jim pouvait et voulait faire. Comme ils ne trouvaient pas de prospects d’une valeur s’approchant des batées de dix cents récoltées dans le ruisseau Bonanza, ils ne sont restés que très peu de temps au camp de Henderson, puis sont retournés vers la source du ruisseau qui a rendu si populaire le Klondike : le ruisseau Bonanza. Ils n’ont pu se rendre bien loin avant que leurs provisions soient entièrement épuisées et, étant donné qu’ils prospectaient en chemin et que Jim chassait, leur progression était lente; mais leur faim augmentait rapidement, et l’épuisement et la faiblesse n’ont pas tardé à se faire sentir. Pour résumer les récits de Jim et de Charlie, puisque ceux-ci se sont attardés sur cet épisode, lorsqu’ils ont tous été trop épuisés et faibles pour prospecter, Jim a finalement abattu un orignal. Il avait auparavant fait feu sur un autre orignal, mais il l’avait manqué; pour la première fois de sa vie, m’a-t-il assuré, et il était armé d’un bon fusil, un Winchester, a-t-il ajouté fièrement.

Après avoir tué l’orignal, Jim raconte qu’il a appelé les autres, qu’il avait quittés un peu plus haut, à venir le rejoindre. Alors qu’il les attendait, il a regardé dans le sable du ruisseau où il s’était rendu pour boire, emportant avec lui une partie de l’orignal. Il a trouvé de l’or, a-t-il raconté, en plus grande quantité qu’il n’en avait jamais vu auparavant. Lorsque les autres l’ont rejoint, la viande d’orignal était cuite et ils ont mangé. Il leur a ensuite montré l’or dans le sable. Ils sont restés deux jours à cet endroit à laver le sable à la batée et à tester le gravier à proximité, en amont et en aval du ruisseau. Après s’être convaincus qu’ils avaient trouvé l’endroit idéal et avoir décidé de jalonner et d’enregistrer des concessions, ils se sont disputés à savoir qui jalonnerait la concession de découverte. Jim la revendiquait à titre de découvreur et Carmac la revendiquait, selon Jim, sous prétexte qu’on ne permettrait pas à un Indien de l’enregistrer. Jim déclare qu’ils ont réglé le différend en convenant que Carmac allait enregistrer la concession de découverte et en remettre la moitié à Jim, ou la moitié des gains qu’il en tirerait. Alors le matin du 17 août 1896, Carmac a jalonné la concession de découverte sur cinq cents pieds en amont et en aval du ruisseau et la N[[superscript]]o[[/]] 1 en aval de la découverte sur une même distance; sur toute la largeur du fond de la vallée ou d’une base de la colline à celle de l’autre colline, de part et d’autre du ruisseau, comme le prévoyaient les règlements à l’époque. La N[[superscript]]o[[/]] 2 en aval a été jalonnée pour Charlie le Tagish et la N[[superscript]]o[[/]] 1 en amont pour Skookum Jim. Ils ont mis dans une cartouche vide de Winchester l’or qu’ils avaient tiré du gravier de surface de la concession de découverte et toute la bande est partie vers le camp à l’embouchure de la Klondike. Là, un petit train de flottage était prêt à partir pour le moulin à scie de Fortymile. Carmac et Charlie l’ont fait descendre et Jim a été renvoyé à la concession pour la surveiller, puisque les environs étaient peuplés d’hommes partis à la recherche de la découverte de Henderson. Pour prouver cela, je n’ai qu’à citer mes notes pour démontrer que deux jours après que Carmac et son groupe aient jalonné, c’est-à-dire le 19 août 1896, Edward Monahan et Greg Stewart ont jalonné deux concessions qui ont plus tard été établies comme étant les N[[superscript]]os[[/]] 28 et 29 à environ trois milles en aval de la découverte, et le jour suivant, D. Edwards, J. Moffat, D. Robertson et C. Kimball ont jalonné ce qui s’est avéré, après arpentage, être les concessions N[[superscript]]os[[/]] 16, 17, 18 et 19 en aval de la découverte. Un évènement qui a causé bien des problèmes et des malentendus, que l’on racontera en détail plus loin, a eu lieu le 22 août : une assemblée de mineurs, tenue à flanc de coteau en face de la concession N[[superscript]]o[[/]] 17 en aval de la découverte. Vingt-cinq hommes étaient présents et il devait y en avoir presque autant qui erraient dans la vallée à la recherche de la découverte de Henderson. Or, comme nous l’avons vu plus tôt, Carmac, Jim et Charlie avaient quitté le matin du 17 la concession de découverte, située à au moins onze milles de l’embouchure de la Klondike, c’est-à-dire à une bonne journée de marche à travers les bois et les marais de la région. Par conséquent, ils n’ont atteint le Yukon qu’en soirée – s’ils l’ont effectivement atteint ce jour-là – et il est certain qu’ils n’ont pu annoncer leur découverte aux gens vivant le long du fleuve Yukon avant le 18. Puisqu’ils ont dû assembler les billots pour le train de flottage qu’ils ont amené à Fortymile, et qu’il a fallu une longue journée pour le flotter jusque là, ils n’ont pas pu atteindre Fortymile, le principal camp du district à l’époque, avant le 21, alors nous avons la certitude que les hommes ayant jalonné le 19 et le 20, et ceux qui ont assisté à l’assemblée du 22, ne pouvaient pas tous avoir obtenu l’information de Carmac et de ses associés, et on ne peut certainement pas lui attribuer la découverte du Klondike. Henderson a toujours été très contrarié par le fait que Carmac ait négligé de lui avoir annoncé la découverte puisqu’il (Henderson) déclare que Carmac avait promis de le faire s’il trouvait quelque chose de mieux que les prospects du ruisseau Gold Bottom. Résultat : Henderson n’a été mis au courant de la nouvelle découverte, qui était attribuable à ses efforts et à son invitation à venir jalonner sur Gold Bottom, qu’une fois tous les terrains des ruisseaux Bonanza et Eldorado jalonnés. Henderson n’a pu, étant donné la courte durée de la saison et la marée descendante, prendre le temps de se rendre au bureau de Fortymile et enregistrer sa concession sur Gold Bottom, avant qu’Andrew Hunker ait lui-même jalonné une concession sur le ruisseau en aval de Henderson, qu’il se soit rendu à Fortymile et ait non seulement enregistré la concession de découverte, mais aussi donné son nom au ruisseau, malgré que Henderson ait écrit sur un gros arbre à la jonction du ruisseau et de la Klondike où il avait laissé son bateau en juillet : « Ce ruisseau se nommera le ruisseau Gold Bottom ». Les règlements miniers de l’époque ne permettaient qu’une seule découverte par « district », dont les limites étaient fixées par l’agent du gouvernement. Une concession de découverte avait été accordée à Carmac sur le ruisseau Bonanza, et une autre sur le ruisseau Gold Bottom, renommé Hunker, à Hunker; aucune autre ne serait donc accordée dans le district du Klondike. Henderson, après ses deux années de dur labeur et après avoir annoncé sa découverte à tous ceux qu’il rencontrait qui étaient intéressés à l’exploitation minière – et même ceux qui ne l’étaient pas – et les avoir invités à venir travailler dans ce nouveau champ aurifère, s’est retrouvé avec une simple concession dans ce même champ.

Lorsque Carmac et Charlie le Tagish ont atteint Fortymile et annoncé leur découverte, peu de gens y ont porté attention au départ. Carmac n’avait jamais exercé le métier de mineur jusque-là, même s’il avait un peu prospecté, et comme il venait d’arriver à Fortymile et n’était pas très connu, personne n’a vraiment accordé d’importance à ses paroles, ce qui aurait probablement été différent s’il avait habité la région depuis plus longtemps et s’il avait été mineur. De plus, son association de longue date avec les Indiens avait mené la communauté à entretenir des préjugés à son égard. Lorsque je suis arrivé dans cette contrée en 1887, je l’ai rencontré au col Dyea. Il était alors très près des Indiens tagish, ou sticks, comme on les appelait. Ceux-ci avaient une entente avec les Chilcoots et les Chilcats, ou les Indiens de la côte, établissant que le territoire au nord du sommet du col appartenait aux Sticks et toute la côte au sud de ce même sommet, aux Indiens de la côte. Carmac parlait les deux langues de façon rudimentaire et avait beaucoup d’influence chez les Sticks. Je l’ai engagé pour m’aider à traverser le col et grâce à son influence, j’ai obtenu beaucoup d’aide de ses amis indiens. Skookum Jim et Charlie le Tagish étaient là et ont tous deux été mes porteurs. Skookum mérite bien son sobriquet de « Skookum » ou « fort », puisqu’il a transporté cent cinquante-six (156) livres de bacon au-delà du col en un seul voyage. On peut considérer cela comme une lourde charge sur n’importe quelle route, mais il s’agit d’une véritable épreuve de force et d’endurance sur un trajet dont la première moitié s’effectue sur la moraine rocheuse d’un glacier et dont la deuxième est constituée d’un col escarpé qui monte sur plus de trois mille pieds en six ou sept milles, et que ce col est parfois si abrupt qu’il faut s’aider de ses mains pour l’escalader. Une fois le col traversé, pendant que nous construisions notre bateau, j’ai confié différents travaux à Jim et l’ai toujours trouvé très fiable, honnête et capable d’effectuer tous les travaux que je lui demandais de faire. Plus tard, alors qu’il travaillait sur sa concession sur le ruisseau Bonanza, je l’ai côtoyé davantage et cela a confirmé l’opinion que j’ai exprimée sur sa personne. Je n’ai pas aussi bien connu Charlie. Pauvre Charlie, alors qu’il célébrait à l’occasion des fêtes l’hiver dernier, il est tombé d’un pont ferroviaire à Carcross sur le chemin de fer du White Pass et s’est noyé. Je l’avais croisé l’été dernier et j’avais eu une longue discussion avec lui au sujet du bon vieux temps et du parcours qui nous avait menés à la découverte alors que nous allions vers Henderson. Encore une fois, avant de repartir l’automne dernier, j’ai eu un long entretien avec Jim, Charlie et le reste de la tribu à Carcross. Les vieux jours ont été ressassés et les vieilles histoires racontées, je suis content de le dire, de façon très similaire aux premières versions que j’avais entendues de leurs bouches.

Skookum Jim

Jim est un prospecteur enthousiaste et, apparemment, son but dans la vie est maintenant de faire une autre grande découverte bien à lui. Il aimerait particulièrement trouver un gros filon de quartz et comprend parfaitement l’importance d’une telle réalisation pour le pays. Il a une connaissance pratique de la prospection qui dépasse largement ce à quoi on s’attendrait de la part d’un sauvage sans éducation. De plus, il a des compétences de prospecteur qu’ont peu d’hommes blancs, puisqu’il ne transporte rien lors de ses expéditions qui durent des semaines, sinon un fusil, une hachette et une batée. Il se sert de son fusil pour chasser et de sa hache pour se fabriquer un abri. Nous avons passé du temps ensemble à discuter d’une expédition qui commencerait à Carcross, se poursuivrait au-delà de la ligne de partage des eaux entre le lac Tagish et la rivière Teslin et de là, à travers la contrée jusqu’à la Pelly, la McMillan et la Stewart. Nous avons discuté longuement des renseignements que chacun possédait à propos de l’itinéraire et de la meilleure façon d’accomplir le travail. Il attendait qu’un peu plus de neige soit tombée pour pouvoir partir avec son traîneau qu’il entendait tirer lui-même. Il est plutôt inhabituel qu’un homme planifie de faire une expédition de cette envergure pour ainsi dire seul, car même si un vieil homme blanc allait l’accompagner, Jim devrait porter seul la majorité du fardeau. Il n’apportait que très peu de choses avec lui, s’en remettant à ses outils pour combler tous ses besoins. Le voyage lui prendrait la majeure partie de l’hiver, si les conditions étaient favorables, mais s’il trouvait quelque chose de payant au début de la saison, il reviendrait immédiatement pour l’annoncer et enregistrer la concession jalonnée.

Je pourrais en dire bien davantage sur la découverte du Klondike et sur l’atmosphère qui régnait lorsque Carmac et Charlie sont venus à Fortymile pour l’annoncer, laissant Jim derrière pour qu’il surveille les concessions qui avaient été jalonnées, mais je ne ferais que développer ce qui a déjà été dit.

Source: William Ogilvie, "Premiers jours sur le Yukon et l’histoire des découvertes d’or qu’on y fait" (Toronto: Bell and Cockburn, 1913), 119-36

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