Personne ne connaît son nom: Klatsassin et la guerre de Chilcotin
   
 

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La dernière atrocité des Indiens

Daily British Colonist, 12 mai 1864

Les renseignements reçus hier matin, dont les détails sont publiés dans le numéro d’aujourd’hui et qui font référence au massacre par des Indiens de quatorze hommes travaillant sur la route de Bute Inlet, est la plus étonnante chose de ce genre à jamais se produire dans l’une de nos deux colonies. Il y a quelque chose de quasi démoniaque dans la manière dont ce perfide massacre a été perpétré. Seize Indiens bien portants, qui sont habitués à faire du remblayage avec les travailleurs et qui étaient accompagnés par un certain nombre de jeunes, se sont approchés furtivement de douze hommes blancs endormis et, armés de fusils, de couteaux et de haches, ils ont fait feu et ils ont attaqué au couteau et à la hache leurs pauvres victimes surprises et sans défense. Trois des hommes ont pu s’enfuir, mais ils ne s’en sont pas tirés tout à fait indemnes, deux d’entre eux ayant été sérieusement blessés. Les autres membres du groupe, quatre en tout, se préparaient à une journée de travail lorsqu’ils ont été descendus sans merci et sauvagement mutilés.

Selon ce qui a pu être établi jusqu’à présent, la cause de cette attaque par les Indiens n’aurait été que le pillage. Les hommes qui sont revenus disent que les Indiens ont été traités avec gentillesse jusqu’à maintenant et qu’il n’y avait aucune indication que des sentiments hostiles existaient avant cette attaque meurtrière. Les travaux du groupe venaient tout juste de repousser la limite du sentier à l’intérieur du territoire des Chilcotins et cela aurait peut-être pu pousser les Chilcotins à être un tant soit peu moins respectueux envers les hommes blancs. Il est possible, toutefois, qu’il y ait eu des mécontentements passés; cependant cela n’est pas envisagé pour le moment et il n’en existerait aucun souvenir. Il y a eu des rumeurs – mais il ne s’agit que de rumeurs – que les Indiens auraient eu quelques différends dans le passé avec le contremaître du groupe, M. Brewster. Il nous est impossible de déterminer si cela est vrai ou faux, mais cela ne pourrait, en aucun cas, atténuer l’atrocité perfide de ces sauvages.

Malgré notre regret de ce terrible carnage d’individus qui étaient innocents, nous ne sommes aucunement étonnés de l’insécurité croissante que ressentent les hommes blancs vivant parmi les sauvages nordiques. Entre l’indifférence insouciante envers la vie indienne démontrée par une partie de notre population, ce qui est inhumain, et une sympathie naïve démontrée par l’autre partie, qui n’est qu’une incitation au crime, l’Indien se voit forcé à enfreindre la loi. Lorsque nous ajoutons à ces malicieux extrêmes la mauvaise foi notoire de notre gouvernement envers les tribus indiennes, il semble miraculeux qu’une guerre générale avec les sauvages n’ait pas éclaté depuis longtemps. Dans plusieurs cas, cette guerre, ou au moins de sérieux problèmes, a en fait été évitée grâce à l’influence des prêtres catholiques romains qui semblent travailler dans cette partie du monde dans le but d’y apporter la civilisation, et ce, avec un zèle qui n’est pas motivé par la libéralité anglaise. Nous savons tous de quelle manière le gouvernement a traité avec les Indiens Cowichan et que sa mauvaise foi, dans ce cas, n’a été égalée que par un manque de volonté à punir les criminels indiens dans d’autres instances. Il faut donc bien peu de perspicacité pour réaliser que l’apathie d’une telle politique a généré, chez les aborigènes, le doute envers notre intégrité et le mépris pour notre autorité.

Le nombre de cas récents d’Indiens qui tuent ou maraudent et qui restent impunis constitue un danger pour la sécurité des blancs qui vivent isolés et c’est une honte pour un gouvernement civilisé. Il est maintenant temps que cesse la tergiversation. Un meurtre a maintenant été perpétré et quatorze de nos citoyens ont perdu la vie. Il est possible, alors que nous écrivons ces lignes, qu’un autre sacrifice sanglant soit offert à l’avidité des Indiens en la personne des six hommes qui sont en route vers l’intérieur du pays à partir de Bentinck Arm. Il ne faut donc pas tarder à tout mettre en œuvre afin que les coupables soient traînés en justice. Il est assez facile de rassembler à Victoria le nombre de volontaires nécessaires à une telle mission. Les difficultés pour retrouver ces meurtriers sont loin d’être insurmontables. Nombre d’entre eux peuvent être identifiés et, maintenant que leur saison de pêche est arrivée, ils se trouveront probablement sur les bords des quelques lacs qui s’échelonnent vers Alexandria. Un groupe d’hommes avançant par Bute Inlet et un autre par Bentinck Arm seraient presque certains de retrouver les voyous en une semaine, ou deux au pire, à compter du moment de leur départ de la côte. Bien entendu, nous ne pouvons dire ce que fera le gouverneur Seymour face à cette situation, mais il est entendu que plus de cent cinquante hommes seront immédiatement rassemblés à Victoria, prêts à obéir aux autorités responsables.

Il est évident qu’une leçon – une terrible leçon – doit être montrée à nos tribus indiennes. Il est vrai qu’elles sont parfois poussées à répandre le sang de l’homme blanc à cause des propres injustices de l’homme blanc, mais il y a aussi la déplorable réalité à laquelle nous faisons face : la convoitise ou les offenses imaginaires sont des raisons amplement suffisantes pour pousser les autochtones au meurtre. Seule la peur peut soumettre complètement de tels sauvages. Laissons leur savoir, comme ils le sauront si notre gouvernement agit avec force, que tout acte d’agression gratuit envers les hommes blancs sera promptement et sévèrement puni; il n’y aura alors que bien peu d’assassinats perpétrés par les Indiens. Laissons la justice suivre inéluctablement les pas du crime indien – une justice libre d’une morbide sentimentalité, d’un côté, et d’une indifférence insouciante et brutale envers la vie des sauvages, de l’autre, et nous n’aurons probablement jamais plus à rendre compte d’une histoire aussi déchirante que celle présentée aujourd’hui à nos lecteurs.

Source: "La dernière atrocité des Indiens," Daily British Colonist, 12 mai 1864.

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