Aurore - Le mystère de l'enfant martyre
   
 

À propos de cette source

Aurore l'enfant martyre

Acte 2, scène 2, p. 186 à 190.

CATHERINE
La petite est là, toute pâle... Si ce n'est pas effrayant! Je vais aller prévenir Monsieur le curé, et aussi deux détectives qui vont cerner la maison; et si on a le malheur de toucher à la petite, eh bien, en route les deux époux pour la prison, car des gens qui n'ont pas de cœur pour leur enfant ne sont pas dignes de rester parmi nous; leur place, c'est d'être enfermés.

TÉLESPHORE
Par ici, docteur, entrez.

DOCTEUR
C'est l'enfant malade?

TÉLESPHORE
Oui, docteur.

DOCTEUR
Vous auriez pu lui donner un meilleur lit.

TÉLESPHORE
Nous avons plusieurs enfants.

DOCTEUR
Ce n'est pas une raison. Allons, examinons l'enfant.

CATHERINE
Tenez, là, docteur. (Lui montrant l'épaule de la petite.) Elle dort, docteur.

DOCTEUR
Voilà un sommeil qui ressemble fort à un évanouissement. Essayons de la ranimer.

MÈRE
(En aparté.) De quoi qu'elle se mêle, celle-là?

DOCTEUR
Oh, c'est une plaie affreuse. D'où vient cette blessure?

MÈRE
C'est hier, en tombant en bas de l'escalier.

CATHERINE
(En aparté.) La saprée hypocrite.

DOCTEUR
Et cette plaie à la main?

MÈRE
C'est en jouant avec le tisonnier rouge.

CATHERINE
Encore une autre invention.

DOCTEUR
Voilà une enfant à qui il arrive beaucoup de malheurs. C'est étrange.

MÈRE
Cette enfant est tellement bruyante, elle est toujours fourrée partout.

TÉLESPHORE
Est-ce bien grave, docteur?

DOCTEUR
Très grave, c'est la fin. Allez vite chercher le prêtre sans perdre une minute.

TÉLESPHORE
J'y cours, docteur. (Il sort.)

MÈRE
La petite Aurore va mourir. (Triste.)

CATHERINE
Non, mais elle en a t'y un front de bœuf! Oh, je vais tout dire. Je vais tout dire.

DOCTEUR
Je n'ai jamais vu dans ma carrière de médecin un cas aussi navrant que celui-là. Ce corps émincé couvert de plaies: on voit que cette enfant se meurt de ses blessures et manque de nourriture.

MÈRE
Pourtant, elle était bien traitée.

CATHERINE
Oui, la lessive et le savon.

DOCTEUR
Je plains ceux sur qui tombera la responsabilité de la mort de cette enfant; il y a quinze jours, j'aurais pu la sauver, mais maintenent, il est trop tard.

MÈRE
Mais avec de bons remèdes?

DOCTEUR
Les remèdes ne peuvent plus rien quand le corps est épuisé par la douleur et les privations. Allons, je n'ai plus rien à faire ici, c'est à Monsieur le curé seul de prendre ma place.

TÉLESPHORE
Par ici, Monsieur le curé, entrez.

CURÉ
Qu'est-ce que l'on dit: Aurore se meurt?

DOCTEUR
Plus rien à faire, Monsieur le curé, je vous laisse, au revoir.

Source: Léon Petitjean et Henri Rollin (Alonzo Le Blanc), "Aurore l'enfant martyre. Histoire et présentation de la pièce par Alonzo Le Blanc (Acte 2, Scène 2)," , Montréal: VLB éditeur: 1921 - 1982.

Retour à la page principale

 
les grands mystères de l'histoire canadienne