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La torture ou ‘question’.

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QUESTION ou TORTURE, [...] est une voie que l'on emploie quelquefois dans les affaires de grand criminel pour faire avouer à l'accusé le crime dont il est prévenu, ou pour avoir révélation de ses complices.

Cette voie consiste à faire souffrir à l'accusé des tourmens violens, qui ne sont pas néanmoins ordinairement capables de lui causer la mort.

On appelle cette torture question, parce qu'à mesure que l'on fait souffrir l'accusé, on lui fait des questions sur son crime & sur ses complices, si l'on soupçonne qu'il en ait. [...]

Pour ordonner la question, il faut un crime constant qui mérite peine de mort, & que la preuve soit considérable. Un seul indice ne suffit point, ni la déclaration d'un seul témoin, si elle n'est accompagnée d'autres indices. [...]

On peut, par le jugement de mort, ordonner que le condamné sera préablement appliqué à la question, pour avoir révélation de ses complices; c'est ce qu'on appelle la question préalable.

Il n'appartient qu'aux cours souveraines d'ordonner que l'accusé sera seulement présenté à la question sans y être appliqué; c'est une grace qu'on accorde aux impuberes, aux veillards décrépits, aux malades & valétudinaires, auxquels la question ne pourroit être donnée sans danger de la vie; on présente l'accusé à la question pour tâcher de tirer de lui la vérité par la terreur des peines.

Les femmes grosses [enceintes] ne peuvent être appliquées ni présentées à la question, mais on ne s'en rapporte pas à leur déclaration, on les fait visiter.

Les sentences de condamnation à la question ne peuvent être exécutées qu'elles n'ayent été confirmées par arrêt avant la question.

L'accusé doit être interrogé après avoir prété serment.

La question se donne en présence des commissaires, & l'on doit dresser procès-verbal de l'état de la question, & des réponses, confessions, dénégations & variations à chaque article de l'interrogation.

Les commissaires peuvent faire modérer & relâcher une partie des rigueurs de la question, si l'accusé confesse son crime, & s'il varie, le faire mettre dans les mêmes rigueurs; mais lorsqu'il a été délié, & entierement ôté de la question, il ne peut plus y être remis.

L'accusé étant ôté de la question doit être de nouveau interrogé sur les déclarations & sur les faits par lui confessés ou déniés.

Quelque nouvelle preuve qui survienne, l'accusé ne peut être appliqué deux fois à la question pour un même fait.

Tous juges, tant royaux que subalternes, peuvent condamner à la question, à l'exception des juges ecclésiastiques, quoique quelques auteurs aient avancé le contraire.

On appelle question préparatoire celle qui est ordonnée avant le jugement définitif; il faut de puissans indices pour ordonner la question préparatoire: la question définitive est celle que l'on donne au condamné avant l'exécution pour avoir révélation de ses complices.

Ce jugement de mort porte que le condamné sera préalablement appliqué à la question ordinaire & extraordinaire.

La question ordinaire à Paris, se donne avec si pots d'eau & le petit tréteau; l'extraordinaire, avec six autres pots & le grand tréteau, qui serre & etend davantage le criminel.

On la donne ailleurs avec des coins & des brodequins; on se sert aussi à Paris de cette sorte de question, quand l'accusé est condamné à mort.

En quelques endroits, comme dans les Pays-bas, on donne la question en chauffant les piés.

Dans le nord, on met l'accusé dans la boue.

En Angleterre, l'usage de la question est inconnu. [...]

, tome XIII, page 703.

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