Journaux

Les journaux sont abondamment utilisés par les historiens pour leurs recherches. Ils représentent une mine d’informations, de sources et de données sur autant d’événements. Ils nous renseignent sur les dernières techniques agricoles, les prix des denrées, les décès, les naissances, les mariages, les événements dramatiques ou banals du quotidien, qu’ils se produisent dans la ville, dans la région et même dans le monde. Transparaissent aussi dans les journaux les mentalités des journalistes et les opinions qu’ils ont de leurs pairs.

Jusqu’aux dernières années du XIXe siècle, les journaux sont des organes de propagande des partis politiques. Avec la généralisation de l’alphabétisation au tournant du XXe siècle, les quotidiens à grand tirage deviennent une source d’information et de divertissement pour un public de plus en plus large. Certes, les rédacteurs continuent à afficher leurs affinités et leurs couleurs politiques, notamment dans les pages éditoriales. Mais de façon générale, les journalistes visent davantage le rapport objectif des informations. De nouvelles rubriques (la page féminine; les sports; les loisirs, etc.) voient le jour – avec des annonces publicitaires de plus en plus nombreuses – à côté des nouvelles «dures» et des commentaires éditoriaux.

Généralement, les journaux québécois du début du XXe siècle sont biens conservés. Les grandes bibliothèques publiques et universitaires possèdent en général des reproductions sur microfilm des quotidiens les plus importants ou propres à leur région. La Société canadienne du microfilm SOCAMI (www.socami.qc.ca) conserve et reproduit également des journaux parus surtout au Québec.

Les journaux d’époque sont d’une aide inestimable pour la compréhension de l’affaire Gagnon. Grâce aux commentaires des journalistes, nous pouvons connaître l’atmosphère de la salle d’audience, les réactions des témoins, des gens qui assistent au procès. Les journaux permettent de rendre vivantes les sources provenant des archives nationales du Québec (ANQ) et d’évaluer l’impact des procès sur le grand public.

Pour ce site, nous avons sélectionné quatre quotidiens de langue française qui existent encore tous aujourd’hui. Deux sont publiés à Montréal (La Presse, Le Devoir), un à Québec (Le Soleil) et le dernier à Sherbrooke (La Tribune). Nous retrouvons dans ce site Internet l’intégral des articles de La Presse et du Devoir, qui ont publiés respectivement 22 et 21 articles sur le sujet entre le 5 avril et le 1er octobre 1920. En comparant la couverture de ces deux journaux, vous êtes invités à réfléchir à la manière dont ces quotidiens – l’un plus populaire et l’autre davantage conservateur – suivent les procès de Marie-Anne Houde et de Télesphore Gagnon. Nous avons également choisi quelques articles du journal Le Soleil et de La Tribune, qui eux, ont publié entre le 13 février et le 1er octobre 1920, 34 et 23 articles respectivement sur l’affaire Gagnon.

Voici quelques renseignements de base sur chacun des journaux retenus pour ces «archives virtuelles» :

La Presse (depuis 1884) : Ce quotidien est dès son apparition un journal populaire, puis il devient un journal d’information. Il est fondé par William-Edmond Blumhart, suite à une division du parti conservateur. Grâce à Trefflé Berthiaume, le journal devient une institution rentable et nationale. Le journal tire parti de nouveaux procédés typographiques (linotype, illustrations) ainsi que de nouvelles façons d’écrire (manchettes, faits divers) pour attirer les lecteurs du monde ouvrier. La Presse s’est associée ensuite aux libéraux.

Le Devoir (depuis 1910) : Fondé par Henri Bourassa. C’est à la suite de la mise sur pied de l’agence Publicité Ltée en 1908, que le journal, qui se veut au service de la collectivité, voit le jour. Pour la production de son quotidien, Henri Bourassa choisit des collaborateurs brillants et expérimentés. Ce journal nationaliste et indépendant devient rapidement un instrument de promotion des valeurs et des intérêts canadiens français. Il lutte contre l’impérialisme britannique, défend la doctrine sociale conservatrice de l’Église catholique ainsi que la cause agricole.

Le Soleil (depuis 1880) : Fondé par une compagnie dont fait partie Wilfrid Laurier, futur premier ministre du Canada. Plusieurs compagnies successives sont tour à tour propriétaires. Libéral modéré, ce quotidien, dont le premier nom était L’Électeur, s’attire en quelques occasions les foudres de l’Église catholique et du même coup, une diminution du nombre de ses lecteurs. C’est pour cette raison qu’en 1896, le journal change de nom pour adopter celui qu’il a encore aujourd’hui, Le Soleil.

La Tribune (depuis 1910) : Fondé par Jacob Nicol et Michael A. Foley, associé aux libéraux. Il prône sa soumission à l’Église et affirme se tenir à l’écart de l’idéologie d’Henri Bourassa et du Devoir. Le quotidien, grâce à des collaborateurs qualifiés, a su devenir le journal non seulement d’une ville (Sherbrooke), mais de toute la région des Cantons de l’Est.

Ces renseignements sont tirés de Beaulieu, André et Jean Hamelin. La presse québécoise des origines à nos jours. Québec, Presses de l’Université Laval, 1987.