Le journal The Star avec l’équipe de recherche : comment l’épave de Franklin a finalement été trouvée (9 septembre 2014 )

À BORD DU NGCC SIR WILFRID LAURIER – Comme pour toute grande découverte, l’épave de l’expédition Franklin a été découverte accidentellement après des années de travail exténuant et monotone.

Cela faisait 166 ans qu’on se demandait où s’étaient rendus les navires de la Marine royale HMS Erebus et HMS Terror après avoir pénétré le passage du Nord-Ouest à la recherche d’une issue à l’ouest et être disparus avec les 129 hommes à leur bord.

Déjà, au 19e siècle, les témoignages des Inuits ont fourni des indices alléchants aux premières équipes de recherche, des indices pointant vers au moins un navire fantôme dérivant dans les glaces vers le sud avec à son bord le cadavre d’un géant blanc.

Ils ont dit qu’il était loin de la pointe où se trouvait une note de 1847 cachée dans une boîte en fer-blanc qui rapportait l’abandon des navires emprisonnés dans la glace. Plusieurs soi-disant experts ont pensé que ce n’était que balivernes et que les Inuits ne racontaient que des histoires à dormir debout.

Il s’avère que les Inuits avaient raison depuis le début.

Cela aura pris plus d’un siècle de recherches et un enchaînement extraordinaire d’évènements au cours des dernières semaines pour le prouver.

En premier, la glace de mer arctique la plus épaisse jamais vue depuis des années a bloqué une flottille de sept vaisseaux, dont des navires hydrographiques équipés de submersibles de haute technologie. C’était la mission la plus importante jamais mise sur pied pour retrouver l’Erebus et le Terror.

Incapables de se regrouper dans la zone de recherche nordique la plus prometteuse qui était située dans la baie Erebus, les navires gouvernementaux et privés ont dû passer plus de temps au sud du détroit de Victoria.

Ils ont maudit la glace.

Puis, un hydrographe fédéral qui cartographiait le fond marin a dû offrir des sièges d’hélicoptère à deux archéologues travaillant pour le gouvernement du Nunavut.

C’est ainsi que le destin, et un pilote de Transport Canada assigné à la Garde côtière, les a menés sur une île aride, une parmi des milliers d’îles arides en Arctique.

Et ce même pilote, qui au cours des années s’était intéressé aux vieilles choses en regardant les archéologues ramasser des artéfacts, a dû procéder comme on le lui avait montré.

Vêtu d’une combinaison étanche orange fluo avec une tuque à pompon rouge, il marchait le long du périmètre et gardait les yeux fixés sur le sol dégarni.

C’est ainsi que le pilote d’hélicoptère Andrew Stirling a déniché l’indice le plus important, celui qui avait échappé à des générations de chercheurs et qui a finalement indiqué aux archéologues la direction de l’épave de la fatidique expédition de sir John Franklin.

[...]

Il a fait signe à Park de venir. Stenton a suivi. Stirling leur a montré le morceau de fer qu’il n’avait pas touché, comme on le lui avait montré.

« Dès que je l’ai vu, j’ai su qu’il était différent de tout ce qu’on avait vu par sa grosseur et sa forme très distincte », a dit Stenton.

Le prenant dans la main gauche, Stenton a dit que c’était dommage qu’il n’y ait pas de larges flèches sur le fer, la marque de propriété de la Marine royale.

« La paume de ma main recouvrait l’objet, a dit Stenton. J’ai ouvert ma main et n’il y avait pas seulement une mais deux flèches étampées dans le fer. Et le numéro 12.

C’était très excitant. Nous savions que c’était une pièce d’équipement de la Marine royale. On s’est dit : wow! C’est fantastique. »

[…]

Plus loin sur la plage, Stirling a trouvé des morceaux de bois en demi-lune d’environ 30 centimètres de diamètre. Un morceau grisé par les éléments se trouvait parmi des roches. Un autre morceau, de mêmes forme et grandeur, était tout près. De gros clous en fer forgés à la main en ressortaient.

De nouveau, il a appelé les archéologues.

Au début, Stenton pensait qu’ils provenaient peut-être d’un tonneau. Après avoir discuté avec des experts de la marine, les archéologues terrestres pensent qu’il est plus probable que les morceaux de bois, lorsque mis ensemble, formeront un stoppeur pour aussière.

Il aurait servi à boucher le trou sur le pont là où la chaîne de l’ancre passait dans le caisson inférieur pour isoler le navire de la mer.

Ils ont rapporté les objets au laboratoire archéologique du Laurier où Ryan Harris, 42 ans, et Jonathan Moore, 45 ans, deux archéologues subaquatiques principaux à Parcs Canada à Ottawa, ont étudié les objets cette nuit-là.

L’objet en métal, qui était probablement une partie d’un bossoir utilisé pour faire descendre les chaloupes de l’Erebus et du Terror, était un morceau de fer rouillé d’environ 43 centimètres en longueur qui ressemblait à un grand spicule en forme de diapason avec des bouts arrondis.

Avec un poids d’environ 4,5 kilogrammes, c’était « un type d’artéfact qui ne pourrait avoir été transporté très loin, à cause de sa lourdeur, a dit Harris. C’était donc une assez bonne indication que nous étions dans le bon voisinage. »

[...]

Les archéologues subaquatiques ont rapidement mis le navire de plongée Investigator à l’eau pour chercher une épave près de l’île, utilisant le poisson du sonar à balayage latéral tiré par un câble armé.

Rapidement, un témoin indicateur de quelques centimètres est apparu à l’écran du portable alors que les images en direct d’un fond marin marqué par la glace défilaient sous leurs yeux.

Le technologue Chriss Ludin, 61 ans, d’Ottawa, venait de passer la barre au technicien Joe Boucher, 33 ans, aussi d’Ottawa.

Harris et Moore menaient normalement des recherches parallèles à bord de bateaux séparés. Mais cette fois-là, ils regardaient les mêmes images sur le sonar.

« Ça y est », a dit Harris lorsque l’épave est apparue. Comme le gagnant d’un sprint, il a levé les deux mains vers le ciel.

« Ce n’était pas tout à fait un cri primal, a dit Moore, mais c’était vraiment proche. Des tope-là fusaient de partout. »

Une fois que Bernier [chef de l’équipe d’archéologues subaquatiques] eut confirmé la découverte, l’étape suivante a consisté à descendre un véhicule sous-marin téléguidé avec des caméras à haute résolution pour aller observer l’épave de près.

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