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Rapport d’Agathe de Saint-Père au sujet de ses entreprises, 13 octobre 1705.

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a Montreal Le 13 8bre [octobre] 1705.

Monseigneur

L’arrivée des vaisseaux m’apprend que vous demandé Compte, Et monsieur Le gouverneur et monsieur de Beauharnois de La reussite de mes entreprises. Cette Explication Monseigneur m'engage a prendre La liberté

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d'en Informer moy mesme Vostre grandeur. La parfaitte connoissance que j'ay des soins que vous prenez du pais, me flatte que vous souffriray ce detail, et que vous trouverez bon que de mon propre mouvement j'ay Levé une manifacture de toille, droguet, serge croisée et couvert[ure]. Pour cet effet, Monseigneur J'ay racheté neuf anglois de la main des Sauvages a mes depens, Je leur ay fait faire des metiers et Leur ay fait monter dans un Logement Commode.

Le peu de Chanvre et de Lin qu'il y avoit pour Lors m'ont obligé de faire amasser Les orties qui sont comme Les mannes du desert dans nos Terres, cette matierre est Inepuisable puisqu'elle n’est Sujette a aucuns accidens. Nous en faisons des toi[lles]

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qui par sa quallité [un mot illisible] a mettre en oeuvre [deux mots illisibles] au Chanvre. Non content de ces preuves, J'ay poussé, Monseigneur, par une pensée Laquelle Je n'ay pu refuser, a Lever des escorces dans Les bois qu'il faut bruller par necessité pour desbarasser Les terres et Les mettre en valleur. Je les ay fait mettre en fillasse, Lesquelles sont très belles souffrant Les Lescive comme les lins. J'en ay fait faire des couvertes en nombre qui par Leur bonté ne cede en rien a celle de Laine, je Les teins de mes bois de diverses coulleurs; La quantité en est sy grande qu'un homme seul en peut Lever quatre cent Livres en Un jour et j'offre a en fournir un nombre tres considerable a quatre sols La Livre estant tres bon pour Les Cables et cordages de vaisseaux

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Ne pourrissant jamais.

Nous avons aussy, Monseigneur, des Cottonnier sauvages dont Le brin est [fait?] comme Le jonc qui est dans Les Lacs qui sont une Fillasse sy blanche quil est inutille de l’herber et fait de tres belle toille.

Cet ordre est differend d’un, qui au bout de sa tige, renferme un duvet dont on fait des Lits.

Nous avons aussy au dessus de Cataraquoy des Cottons pareils a Ceux des Isles dont on fait de fort beau Linge, son duvet se trouve enveloppé dans une petitte bource que La nature de cet arbre produit a ces Extremitez. Le trajet joint aux deffences d’y aller fait La difficulté d'en avoir.

J'envoye, Monseigneur, a vostre grandeur

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des echantillons de tous ses ouvrages qui ne sont Imparfaits, faute d'outils qui nous ont manqué par La perte de La Scaine [navire La Seine] et du Saint jean aujourd’huy dans Le quel se trouve touttes Les Cardes.

Nous avons des boeuf Illinois que Nous avons aussy au dessus de Detroit Lesquels nous fournissent plus que nos moutons des Laines dont nous faisons des serges sur fil tres bonne, et J'envoy a vostre grandeur un eschantillon de ces matieres. Ce Climat est sy bon que outre La nourriture qu'il donne au plante comme a touttes ces Fillasses, Il ne refuse rien au gros bois, et Leur fourny un sucre qui facillite

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L’habitant a faire une tres grande quantité de sucre en pain Comme aux Isles, Castonade, sireau et sucre candy, Il s'en est fait de ma connoissance plus de trente mil Livre a montreal.

Je repette a vostre grandeur que Les Paines d'icy sont Incomparablement meilleur que celle de france.

Je ne finirois Jamais, Monseigneur, sy je m'escoullois par Les connoissances que j'ay des avantages qui se trouvent en Canadas. J'abrege par La Crainte que j'ay d'ennuyer vostre grandeur. La justice qu'elle rend a tous un monde me fait esperer d'en estre remarqué, et que vous accorderez a mes travaux un secours sans

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Lesquelles Il m'et Impossible de soutenir ne L'ayant este jusques a aujourd'huy que par mon courage qui m'a Empeché de Ceder aux difficultez et despences qu'il ma fallut faire dans ces Commencemens.

Accordez dont a mon zele, Monseigneur, un moment de vos Intentions, vous assurant que Le pais partagera Les graces que vous me feray par Les fruits qu'il reçoit Incessament de L'employ des mattieres qui jusque a present ont esté Enveloppé dans L'obcurité d'ou je Les ay tirées.

Mon Imagination, Monseigneur, m'a procuré l'honneur d’entrer dans une petitte partie de vos

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Intentions que je suivray par Les soins et La Conduitte que j’y apporteray.

C'est tout Ma reconnoissance trouvera son cours en conjurant Le seigneur de conserver vostre personne pour Le bien de L’estat et a qui Je suis parfaittement devouée par un tres proffond respect.

Monseigneur

vostre tres humble
et tres obeissante

de montreal ce 13e octobre 1705, servante agatte de St pere de repentigny

Source: France. Archives nationales, Fonds des Colonies. Série C11A. Correspondance générale, Canada, vol. 23, fol. 343-346v, Saint-Père, Agathe de, Lettre sur les productions du Canada, 13 octobre 1705.

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